la presse en parle

Affreux bêtes et pédants

un dispositif scénique étonnant mêlant vidéo et je ujd'acteurs
le dispositif scénique

La Terrasse


satire foisonnante et mordante menée tambour battant, le spectacle de la compagnie des Dramaticules braque une loupe scrutatrice sur le monde du théâtre. Dur métier que celui d’artiste !
On comprend pourquoi dans sa note d’intention Jérémie Le Louët cite avec humour Copi dans La Nuit de Madame Lucienne : « Vous allez la regretter, la vie de théâtre ! » Après avoir porté à la scène des oeuvres littéraires, les membres de la compagnie des Dramaticules signent collectivement le texte de ce spectacle, qui fait suite à une série de trois petites formes intitulées Plus belle la vie d’une compagnie, jouées hors les murs.

Sous-titré « une satire de la vie culturelle française », ce courageux et ambitieux spectacle, souvent drôle, explore diverses facettes du monde du spectacle vivant et décortique sur le mode de la satire acérée les relations entre l’art et le public, entre l’artiste et le directeur de structure, entre les comédiens et le metteur en scène.
La régie sur le plateau, quelques rares accessoires, une caméra et un écran en fond de scène, la vidéo jouant souvent d’effets de miroir : on vous montre tout !
La scène inaugurale s’assène comme un coup de poing : Jérémie Le Louët fait entendre Le Manifeste du futurisme (1909) de Filippo Tommaso Marinetti. Tabula rasa ! Ce texte révolutionnaire et flamboyant exalte la violence, l’agressivité et la fièvre du mouvement (tout pour finir dans la gueule du fascisme). Jérémie Le Louët le clame et le vocifère avec la maestria qu’on lui connaît.

Metteur en scène tyrannique
Lumière dans la salle.  Exit le poète sublime et furieux. L’exigence radicale et provocatrice cède la place au micro qui circule, place à notre petit monde. Se succèdent alors diverses séquences (certaines scènes percutantes, d’autres moins pourraient être resserrées) : un débat avec les spectateurs commentant cette scène inaugurale (parmi nous sont installés deux comédiens : l’un prof de français féru de théâtre, l’autre consommateur de télé), une présentation de saison (avec la performance d’un artiste qui déclenche l’hilarité de la salle), l’entrevue entre un artiste et un programmateur (monstre masqué !), la répétition à la table de l’acte I scène 3 de Phèdre, les aveux de Phèdre à Oenone (la « petite vieille » ainsi nommée et interprétée par Julien Buchy) avec un metteur en scène tyrannique (Jérémie Le Louët of course) qui pète un câble. Comme dans la scène de Phèdre très réussie, et vraiment drôle, le spectacle convainc particulièrement lorsqu’il se concentre sur l’acte de création même, dans toutes ses dimensions – économiques, artistiques et bien sûr humaines.
Alors sous le rire se laissent voir toute la fragilité, toutes les difficultés et les peurs. Ancré dans le réel, pétri d’autodérision, maniant clichés et stéréotypes, le grotesque cultive la proximité plus que la distance. La compagnie des Dramaticules prouve une fois de plus son inventivité et sa virtuosité : ils savent être… et paraître !
Agnès Santi – Janvier 2014


Télérama


Le sous-titre Une satire de la vie culturelle française, et le nom de la compagnie, Les Dramaticules, en disent davantage sur cette création que le titre lui-même.
La troupe a pris le parti de se regarder, elle et le monde du théâtre, dans un miroir (à peine) déformant. Un débat surréaliste acteurs/spectateurs en début de représentation alors qu'il n'y a encore rien sur quoi débattre, sauf pour le prof de service ; la présentation de la saison d'un théâtre où l'accumulation de clichés conduit à l'hilarité ; une répétition de Phèdre qui vire à la séance de torture (belle composition de Julien Buchy)…  Autant de situations cultivant l'autodérision pour expliquer les affres de la création.
Une satire souvent drôle par ses exagérations et son réalisme. Mais qui pêche aussi par un côté superficiel.  Le sujet aurait mérité forage plus profond.
Frédéric Péguillan - Janvier 2014


Rue du théâtre


Un théâtre intelligent, drôle et politique terriblement drôle, la nouvelle création de la compagnie des Dramaticules est aussi une salutaire petite merveille de subtilité. A voir absolument.  Satire des « acteurs de la culture », Affreux, bêtes et pédants constitue surtout une fine analyse sociologique du monde du théâtre : spectateurs, directeurs d’établissements culturels, comédiens, tout le monde est épinglé. Mais là où d’autres se limitent à une critique complaisante qui vire à l’autocélébration, la compagnie porte un véritable questionnement politique.
Si le théâtre a un rôle à jouer dans la société, il ne doit pas, il ne peut pas se contenter de s’adresser à un public d’habitués généralement plus lettré que la moyenne. Les tarifs attractifs, les opérations visant à attirer de nouveaux publics n’obtiennent que des résultats mitigés qui ne remédient pas à l’entre-soi. Le théâtre populaire a vécu et les Dramaticules s’efforcent de comprendre ce qui l’a tué.
Entre les créations absconses qui voudraient faire passer la nudité pour la subversion absolue mais laissent le public de marbre, les directeurs de théâtre qui préfèrent les projets à la mode plutôt que ceux qui ont du sens, les comédiens qui prennent les manifestations d’intermittents pour des occasions de promotion personnelle, la
concurrence de la télévision et du star-system ou encore la tyrannie des metteurs en scène sexistes et exagérément susceptibles, la troupe réunie par Jérémie Le Louët explore de nombreuses pistes. Elle n’oublie pas d’y impliquer le public par le biais d’un intéressant dispositif vidéo. On regrettera juste que, avec de telles ambitions, les femmes soient si peu présentes puisque Noémie Guedj est seule face à quatre comédiens. Le décor minimaliste et modulable permet d’enchaîner sans temps mort les scénettes créées collectivement. Il est vrai que pratiquant également les représentations en appartement, la troupe a l’habitude de s’adapter à tous les terrains. De ce fait, on peut rire continûment tout au long du spectacle.
Car c’est là que réside l’exploit : sans rien renier de ses exigences politiques, Affreux, bêtes et pédants est aussi une pièce hilarante. Hors de leur contexte, mis en valeur sur scène, les stéréotypes, les idées reçues et les lieux communs frappent par leur absurdité et leur bêtise et provoquent nécessairement le rire. L’objection selon laquelle, en ces temps de crise, il faudrait se distraire et non réfléchir est donc nulle et non avenue puisque les Dramaticules prouvent magistralement que l’un n’est pas exclusif de l’autre.

théâtre et politique
Mais à vrai dire, plus que pour le moment de rigolade ou la qualité de la pièce, il faut aller voir Affreux, bêtes et pédants parce que c’est un spectacle important qui témoigne d’une prise de conscience par rapport à des problématiques spécifiques à notre époque. Avec ses propres moyens, plus dramatiques et moins documentaires, la pièce peut se rapprocher de l’initiative du film de Balbastre et Kergoat, Les Nouveaux chiens de garde.
En se moquant des gardiens du temple, les Dramaticules invitent tous les acteurs du monde culturel à se réapproprier un outil qui leur appartient et à le rendre à nouveau agissant. Ils rejoignent encore les préoccupations du sociologue et historien Gérard Noiriel qui, notant l’échec des chercheurs à s’adresser au public et à juguler le racisme, prône le retour à un théâtre politique et une alliance des hommes de science et des hommes de théâtre. Ces derniers, en provoquant l’émotion, étant selon lui plus
susceptibles d’imprégner l’intellect des spectateurs, une assertion qui semble depuis longtemps partagée par la troupe de Jérémie Le Louët.
Aurore Chery - ruedutheatre.eu - Janvier 2014




Théâtre online



Coup De Coeur !
Ce spectacle extraordinairement ciselé dans son écriture comme dans son interprétation est une perle d'intelligence et de finesse, franchement comique, sur les affres du monde culturel. À ne pas manquer.
Janvier 2014



Toute la culture


Ceux qui se rendent régulièrement au théâtre ou à des pièces de danse contemporaine, vont prendre un plaisir fou à se remémorer ces soirées soi-disant intellos et si soporifiques où l’on ne rêve que d’une seule chose, hurler en quittant la salle. Car «Affreux, bêtes et pédants » relate tous les clichés du spectacle vivant dans un style
délicieusement acerbe, satirique et fort drôle.

Dès le début, Jérémie Le Louët hurle le Manifeste du Futurisme de Marinetti et engrange un débat avec le public. Deux ou trois personnes s’interrogent sur ce texte puis un homme prend la parole pour expliquer qu’il préfère Pierre Palmade et Plus belle « ta » vie !
ne joute verbale s’installe ensuite entre ce spectateur qui ne comprend pas que l’on puisse vivre de son métier d’acteur sans passer à la télé et un autre complice (Anthony Courret) qui avoue faire du théâtre amateur avec ses élèves et son incompréhension de n’être jamais programmé ni même reçu par un directeur de théâtre.
Le ton est donné ! La dérision est l’angle de cette création d’où émergent les aberrations et certitudes loufoques de certains artistes.
Malheureusement cette caricature s’avère être fondée sur des faits réalistes. Car la présentation de saison qui suit, relate fidèlement d’autres initiatives du même genre. La directrice du théâtre (Noémie Guedj) très sure d’elle tente de prouver que ses choix vont séduire un large public alors qu’elle n’a pas vu les pièces qu’elle programme. Elle n’a qu’une seule chose à offrir de concret, c’est l’inénarrable ébauche de travail d’un artiste (David Maison) qui se cherche. Il se met nu, se recouvre le visage de boue et exécute quelques mouvements très très lents au sol. Pour dire quoi ? Rien bien sur, sauf qu’il est persuadé de proposer une œuvre complète sur un sujet inextricable qui va durer… huit heures.
Ca vous rappelle quelque chose ?
On pense à ces chorégraphes qui mettent une phrase de Deleuze en exergue de leurs pièces et ne développent jamais aucun thème, et font fuir la salle entière.

S’ensuit une première répétition de Phèdre. Mais, l’intention du metteur en scène est d’entremêler cette pièce de Racine avec La Mouette de Tchekhov.
On est en plein délire !
Sa direction d’acteur se transforme en apothéose d’alexandrins où Phèdre (Noémie Guedj) et OEnone joué par un homme, (Julien Buchy) déclament leurs rôles sans retenue.
Le tout, superbement bien interprété est accompagné par de multiples musiques et sons et surtout filmé et projeté sur écran géant ce qui permet de mieux percevoir les détails de cette burlesque création collective qui, finalement, donne une réelle envie de continuer à aller au théâtre.
Sophie Lesort - toutelacutlure.com - Janvier 2014