KARIMOUCHE "Raggamuffin" par machineurs


le Point
 "Présente sur les scènes des plus grands festivals de l'Hexagone, on l'a particulièrement remarquée lors de son passage en mars 2011 au fameux festival Chorus des Hauts de Seine, lorsqu'elle a assuré la première partie d'Higelin. Cette trentenaire au caractère bien trempé revendique le mélange. Et c'est dans la musique qu'elle fait passer ce message, en chantant du Jacques Brel sur du hip-hop. Ses influences : Björk, Oxmo Puccino, Herbie Hancock, mais aussi Léo Ferré... un véritable choc culturel."
 
Le nouvel Observateur
 "Une fine mouche au minois futé et la langue bien pendue. Karimouche nous emballe. Quel tempérament !



Elle s’appelle Karimouche. Pourquoi changer ? Depuis l’enfance, ses proches l’appellent Karimouche et avec son premier album, Emballage d’origine, c’est bien d’elle dont elle parle. Ce nom lui va bien : Carima et fine mouche. Karimouche, une gouaille mi-banlieue mi-Audiard, des sentiments qui n’ont pas froid aux yeux, des mots qui bousculent les mollesses du quotidien, une autodérision délirante… « Je ne suis pas chanteuse, mais il y a des choses chantées, d’autres slammées, rappées… C’est un mélange de ce que j’aime !”

Un mélange dans sa vie, aussi. Qu’on n’attende pas trop de clichés de la fatalité sociale dans son histoire. D’un HLM où sa mère élève seule trois filles, elle s’envole vers son rêve : concevoir et réaliser des costumes de théâtre. Mais en même temps que, par le crayon et par l’aiguille, elle fait son chemin dans les coulisses, elle se lance dans le café-théâtre, seule en scène. Curriculum vitae fourni : des sketches bien sentis pendant des années au Nombril du Monde, à Lyon, sept ans aux costumes puis sur scène avec la compagnie de danse hip-hop Käfig, des pièces de théâtre, des expériences variées au bout desquelles, naturellement, elle arrive à des chansons, ses chansons.

Un producteur la contacte et tout s’enclenche : le disque est mis en chantier, elle commence à tourner, elle suscite un large engouement après son passage aux tremplins de plusieurs festivals (Régions en scènes, le Chaînon ou encore les Découvertes du Printemps de Bourges). Il est vrai que Karimouche est un Ovni. Déjà, elle a un pied dans la chanson française (les disques de Ferré et de Brel d’un oncle) et l’autre dans les musiques urbaines.

Ensuite, elle prend à contrepied, et même à rebrousse-poil, tous les clichés de la beurette de banlieue qui prend le micro. ”« On m’a souvent demandé : « Carima, vous faites du r’n’b ou du hip hop ? » Y a une loi qui dit : toutes les Carima, Nadia, Fatima et les autres ne peuvent faire que du hip hop ou du r’n’b. Et bien non ! J’aime le hip hop, mais aussi plein d’autres choses”. Karimouche veut jouer à raconter des histoires. La mélodie et le théâtre s’unissent pour offrir une musique évocatrice d’images et faire dans la simplicité du verbe des chansons empruntes d’une poésie universelle.

Rien d’étonnant à ce qu’elle ait séduit Mouss et Hakim Amokrane ainsi que Julien Costa du collectif toulousain issu des Zebda, Origines Contrôlées, qui prêtent la main à la réalisation de son disque, alors que son vieux complice de théâtre, Jacques Chambon (le Merlin de la série Kamelott) signe deux textes, Firmin et Contretemps. Karimouche chante-rappe-parle à la première personne du singulier, brode sur ses défauts (réels ou supposés), détaille des déboires de trentenaire (Ché pas ce ke j’veux, Parasites…), délire sur l’idée d’écrire un tube (Raggamuffin), visite le mythe de la fille de joie (Firmin). « Je ne fais pas de la chanson moraliste, je préfère raconter des histoires, l’écriture cash, les mots simples, les situations très imagées, comme des courts métrages. » Oui, elle aime Missy Elliott, Miss Dynamite et Eminem mais aussi la grande Fréhel, l’immense chanteuse réaliste de l’entre-deux-guerres – « Je pense que je reprendrai un jour une de ses chansons. » Et Piaf ? Karimouche n’a pas la même passion pour la chanson d’amour déchirante. « Je ne sais pas en faire. Je n’arriverai peut-être jamais à écrire une chanson d’amour. Dès que j’essaie le truc joli ou un refrain poétique, ça part dans l’humour. » Ce n’est pas seulement une déformation héritée de ses années de théâtre : « L’humour est souvent une bonne solution pour faire passer d’autres sentiments, comme le masque ou la marionnette au théâtre : ça donne le courage de jouer tout ce qu’on ne peut pas assumer à visage découvert. » Et souvent, les textes graves de Karimouche courent sur des rythmiques enjouées, avec cette idée que les décalages enrichissent l’aventure – celle du créateur comme celle de ses spectateurs.

Elle est devenue une des sensations de scène les plus fortes de la saison avec ses concerts au line-up resserré et fécond – Kosh à l’human beat box, Jean-Pierre Caporossi au clavier – qui s’élargira sans doute prochainement d’un guitariste. Ses concerts touchent les fidèles de chanson et ceux qui n’en écoutent pas, ceux qui aiment le rap et ceux qui n’en écoutent pas, les fous de musiques urbaines et ceux qui n’en écoutent pas. En sens inverse des clichés, toujours le mélange des genres…
Tchatches, papotages, causettes, chants et slams subissent des mues surprenantes sur des beat hip-hop, funk, ou chanson, depuis longtemps trimballés dans son escarcelle.