autour de Richard III

III

La scène n’est jamais un intérieur domestique, mais un espace impitoyable…
Rire jaune c’est faire la découverte de la complexité : notre plus grand espoir…

Howard Barker. Arguments pour un théâtre 


Le travail lent de maturation et d’appropriation du texte que nous menons depuis des mois cherche à atteindre la plus grande évidence sensible de chacune de ses 17 séquences, lesquelles nous font passer de la farce à la tragédie, de la sphère intime à la sphère publique, du lyrisme au grotesque….

S’il importe de clarifier les enjeux de chaque scène, pour que saute aux yeux l’énormité, la brutalité, de la fable, il importe tout autant de laisser  surgir toutes les couleurs, tous les contrastes qui font du texte de Philippe Malone un immense texte théâtral, tissant ensemble divers registres, du  poème échevelé à la comédie la plus cinglante.

Très vite, s’est imposée à nous la présence permanente au plateau de  l’ensemble des protagonistes, ceux qui ne sont pas engagés directement dans l’action devenant observateurs et témoins de ce qui se trame et, bien sûr, les concerne.

Ce regard porté depuis le plateau sur l’action dédouble et aiguise le regard du spectateur. Et nous entraîne dans un univers d’images croisées : chaque scène est en  effet vécue, ou fantasmée (désirée, redoutée, imaginée) par chacun.

Au fil du temps, quelques signes sont venus se poser sur le plateau, évoquant l’enfance, l’immaturité de Richard : un petit cheval, un petit trône,  un meuble avec miroir où interroger et construire sa propre icône… L’ensemble est traité visuellement en monochrome rouge.

Au sol, et dans l’espace de jeu des acteurs, lignes transversales et diagonales s’entrecroisent, inscrivant la frontalité du propos et les moments d’adresse directe au spectateur, mais permettant des lignes de fuite pour la pensée, pour la tragédie, pour l’histoire. Pour répondre à la construction très cinématographique, non linéaire, du texte, le rythme global est donné par le contraste brutal – sans transition -  entre les séquences, interrompues à leur point d’acmé par de brèves intrusions musicales, rythmant implacablement l’ensemble.