entretien avec Jean Mereu

À La Vie La Mort

Le Triomphe de la Mort, exposé au Musée du Prado de Madrid, compte parmi les tableaux les

plus célèbres au monde. Peinte en 1562 par Pieter Bruegel dit l’Ancien, l’oeuvre est une allégorie sur l’inéluctabilité de la Mort représentée tour à tour par les scènes de guerre, les crimes, les exécutions, les suicides, les fuites inopérantes dans le jeu, la bravoure, l’amour et la religion.

Portés par l’incroyable richesse du tableau, par son message universel, par l  découverte toujours renouvelée de ses détails, par sa nature fantastique proche de Jérôme Bosch, par les résonances suscitées, nous sommes allés dans les rêves les plus fous, les plus intrépides mais aussi, à notre sens, les plus judicieux.

 

Le processus de création s’est fait dans une symbiose permanente entre musique et image, les diverses propositions ont infl échi et l’une et l’autre, ont structuré les deux partitions, ont pétri les deux matières pour qu’elles n’en fassent plus qu’une. Pour, fi nalement, transposer le tableau dans sa dimension spectaculaire, intelligible et sensible.

L’écriture et l’interprétation musicales nous ont été dictées par le tableau lui-même, par la longue immersion dans ses exhalaisons humaines, satiriques et cruelles. L’orchestration reprend quas les instruments qui y fi gurent : la vielle à roue, la trompette, la contrebasse (en place de la viole de  gambe), le saxophone (en place des fl ûtes). La musique traverse les âges, autant baroque, traditionnelle que contemporaine, autant écrite qu’improvisée.

Le travail vidéographique s’attache à révéler le tableau, comme un grand livre d’images, dans sa puissance comme dans son infi niment petit. On n’a pas hésité à recourir au détourage, à l’isolement des scènes, des personnages, des paysages pour ensuite le restituer dans sa profusion majestueuse…

La projection s’effectue sur écrans de tulle. En plus de la mise en perspective des images, le principe permet, par instants, l’incrustation bien vivante des musiciens en action, dont la présence, se transforme parfois, par la magie des lumières, en vision surréelle et picturale.

Jean Mereu